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Le développement touristique des destinations de montagne en été : pourquoi miser sur le VTT ?

En France comme à l’international, le VTT en montagne attire un public de plus en plus nombreux. D’après l’excellent Réseau Veille Tourisme, un sport qui rassemble 2 millions de pratiquants au Canada, ne peut pas être un sport de niche… Le VTT se démocratise et n’est plus seulement réservé à un public d’experts. Le balisage d’itinéraires spécifiques, les aménagements réalisés par les stations de montagne et l’évolution du matériel offrent désormais à chacun la possibilité de se faire plaisir sur les sentiers de montagne. Le VTT en montagne c’est aussi « un style de vie » associé aux sports de glisse qui rassemble : en France plusieurs évènements donnent rendez-vous aux passionnés de VTT (pros comme amateurs), à l’image de la Free Raid Classic aux 2 Alpes qui a regroupé cette année 1647 participants ou encore de la Coupe de monde de « mountain bike » dont des manches sont régulièrement accueillies par les stations françaises. Alors pourquoi les stations devraient miser sur le VTT pour développer leur fréquentation ?

Contexte

Cross-country, enduro, descente, free-ride…les disciplines varient en fonction du terrain et des aménagements mis en place. La popularité grandissante du VTT de descente auprès du grand public, pousse aujourd’hui la plupart des stations de ski à s’équiper en « bike parks » pour la saison d’été et à adapter leur offre à tous les niveaux de pratiques. Car, si le public habituel du VTT de montagne comprend en majorité des hommes entre 25 et 45 ans, les plus jeunes sont également bien représentés, ainsi que les femmes, comme à Squamish aux Etats-Unis, où elles représentent 45% de la clientèle VTTiste !

L’intuition Nord-Américaine sur le potentiel touristique du VTT de montagne et ses retombées économiques

Outre atlantique, on a senti le vent tourner ! Canadiens et américains s’intéressent, depuis quelques années déjà, au potentiel touristique du VTT de montagne. Ainsi, la plupart des études de grande ampleur sur le sujet ont été réalisées par nos cousins nord-américains. Dans un article paru en 2011, Réseau Veille Tourisme parlait de faire du VTT de montagne un « produit touristique dynamique et excitant », relevant un engouement de 7% de la population pour ce sport et soulignant une offre attractive des destinations de montagne canadiennes, qui posséderaient les « pistes de vélo de montagne parmi les meilleures au monde ». L’article pointait également deux caractéristiques essentielles du public adepte du VTT de montagne : il possède un revenu élevé (pour le canada, 59% des pratiquants ont un revenu par ménage de 75 000 $ et plus) et aime voyager dans le but de pratiquer son sport, puisque « 80% des amateurs de VTT de montagne ont réalisé un voyage d’une nuit ou plus pour pratiquer leur sport ».

Ce dernier point ouvre un horizon de possibles pour le développement d’un tourisme lié au VTT de montagne, puisque cela transforme un pratiquant sportif en un visiteur potentiel pour une destination lointaine. Pinkbike place ce constat au centre de son analyse des impacts économiques du tourisme lié au VTT. Dans un article de juin 2014, le site publie une étude comparative de l’impact économique du tourisme lié au VTT sur différentes destinations de montagne. Les destinations analysées ont été sélectionnées selon deux critères : ce sont des « hauts-lieux » du VTT présentant une offre spécifique pour les pratiquants et il était possible d’obtenir des données pertinentes à leur sujet.

L’étude est basée sur une conviction : la pratique du VTT a un impact économique positif important sur une destination qui choisit de développer son offre en la matière. Une bonne expérience offerte aux pratiquants renforce la qualité de vie des populations locales et permet d’attirer des visiteurs extérieurs qui apportent des devises mais aussi de nouvelles idées !

Une communauté ouverte et familiale à fort potentiel économique

Selon l’étude de PinkBike, la durée moyenne de séjour dans une même destination pour un VTTiste est de 3 à 5 jours. Cette durée de séjour est dans la moyenne, voire supérieure à la moyenne des durées de séjour pour tous les publics touristiques confondus. De plus les VTTistes sont enclins à se déplacer dans une destination lointaine dans le but de pratiquer leur sport, et plus ils vont loin, plus leurs dépenses augmentent. On note un pouvoir d’achat plutôt élevé chez le public VTTiste avec une dépense moyenne par jour oscillant entre 60 et 100 $. Les VTTistes voyagent pour pratiquer leur sport mais ne forment pas pour autant des communautés exclusives de pratiquants. Un nombre croissant de visiteurs des destinations étudiées est accompagné d’un partenaire non pratiquant ou voyage en famille.

Les chiffres clé et grandes lignes de l’étude de PinkBike

L’aménagement d’un large réseau de pistes VTT importe autant (voire plus !) aux pratiquants que la présence d’un bike park : 52% des visiteurs de Whistler affirment venir pour les parcours exceptionnels plutôt que pour le bike park. Bellingham a également développé un grand nombre de parcours diversifiés et est apprécié pour cette particularité.

Pour la plupart des destinations étudiées, plus de la moitié des pratiquants ne sont pas des locaux et viennent souvent de loin pour pratiquer leur sport.

En 2007, 49% des VTTistes de Squamish n’étaient pas de la région et 30% d’entre eux venaient de destinations lointaines. On compte 54% de visiteurs à Rossland dont 23% qui n’étaient pas originaires du Canada. Golden quant à elle, affiche 75% de visiteurs !

La cible VTTiste s’élargie aux femmes. A Squamish le public feminin représente 45% de la fréquentation.

Les revenus de la clientèle VTTiste pour la plupart des destinations étudiées sont assez élevés. A Rossland, 48% des visiteurs possèdent un revenu moyen par ménage supérieur à 100K $. Le même revenu est relevé en Oregon chez 43% des VTTistes.

La pratique du VTT en montagne est en expansion dans la plupart des destinations citées et remporte l’adhésion d’un public toujours plus nombreux. En Suisse en 2010, 11,8 % des visiteurs pratiquaient le VTT. Le VTT se place également en Suisse parmi les activités les plus populaires devant le ski de randonnée, le tennis et le golf !

Les atouts pour devenir une destination « mountain bike » 

D’après l’étude de Pinkbike, c’est la combinaison de plusieurs atouts qui rend une destination attractive pour les VTTistes. Le premier semble être la présence d’une communauté locale passionnée et active de pratiquants, ainsi que d’une « bike culture » bien ancrée dans la destination. Le potentiel et la richesse du territoire ainsi que l’aménagement d’un large réseau de parcours représentent un second atout essentiel.

L’exemple de Squamish qui a vu augmenter fortement sa fréquentation par les VTTistes ces dernières années donne quelques pistes sur les bonnes pratiques à adopter pour devenir une destination prisée par ce public. Selon Jeff Cooke, président de la SORCA, cet engouement est dû à « la qualité des pistes, la réputation grandissante de Squamish comme destination VTT, la visibilité amenée par certains parcours d’exception comme Half and Full nelson, la visibilité qu’apportent les vidéos réalisées par des riders de niveau mondial à Squamish, les facilités d’accès et le développement général du VTT de montagne dans la région. »

Les points qui font débat

Cette étude, nous l’avons dit, est orientée vers une approche très positive de l’impact de la pratique du VTT sur les destinations de montagne (approche essentiellement économique). Cependant, cette vision peut se heurter à certaines critiques liées à la protection de l’environnement (impact des sports de nature sur la faune et la flore dus à la pollution ou à la simple présence de l’homme), au partage de la montagne entre les différents pratiquants qui empruntent les mêmes itinéraires et à la sécurité des VTTistes qui poussent parfois la pratique à l’extrême. Comme pour d’autres sports de nature, le développement de la pratique du VTT en montagne semble être soumis à l’acceptation par les pratiquants et les destinations d’une forme d’activité raisonnée et sensible à ces différents sujets.

L’offre française : panorama et premiers constats

En France, les opportunités de développement touristique liées au VTT en montagne ont aussi été repérées et nombreuses sont les stations de ski qui proposent une « version été » de leur domaine skiable, transformé en réseau de parcours VTT, pistes de descente ou bike park. Rentabiliser un domaine skiable, attirer la clientèle en montagne durant l’été, amortir les investissements engendrés par les remontées mécaniques, démocratiser la glisse sous toutes ses formes…les motivations au développement d’une offre VTT par une destination de montagne peuvent être multiples.

SWiTCH, Bike Solutions et Laurent Vanat ont mené en 2011 la première étude française sur les retombées économiques du VTT de descente : une analyse basée sur deux stations, les Deux Alpes et les Saisies, qui a permis de dessiner les grandes tendances d’une pratique en pleine expansion.

Les données recueillies sur la cible VTTiste amorçaient déjà les tendances décrites dans l’étude de PinkBike, largement axée sur des destinations Nord-Américaines (rappelons cependant que l’étude française concerne uniquement la pratique du VTT de descente) : le public VTTiste est en majorité un public masculin (87% des pratiquants) qui a plus de 35 ans et qui aime rouler en groupe (93%).

Les différences notables entre les 2 études portent sur la féminisation de la pratique que l’on ne trouve pas dans l’étude française, ainsi que la durée du séjour qui semble plus courte en France (60% des forfaits vendus sont des forfaits « journée »).

L’étude française pointe aussi d’autres données que l’on ne trouve pas chez PinKbike. Le public du VTT de descente n’est pas un public expert : 60% de la clientèle est d’un niveau « débrouillé » ou « débutant » ! La tendance dessinée par cette étude serait donc une certaine démocratisation du VTT de descente. Cela est confirmé par les offres développées par certaines stations, comme à Val d’Isère avec l’ouverture de pistes vertes de descentes, permettant aux petits et aux débutants de se lancer.

Concernant les dépenses réalisées par la clientèle VTTiste, elles sont en France aussi assez élevées. Un pratiquant de VTT de descente dépense en moyenne 653 euros pendant sa visite. Un pratiquant confirmé a tendance à dépenser plus qu’un débutant, bien que certaines stations comme les Saisies parviennent à dynamiser les dépenses des débutants. Aux 2 Alpes, la clientèle venue spécifiquement pour faire du VTT de descente a dépensé plus de 20 millions d’euros au cours de l’été 2011. Enfin, l’étude démontre qu’1 euro investi dans le forfait génère entre 8 et 12 euros de dépenses annexes, ce qui amène à la conclusion qu’avec un produit complet, le VTT de descente permet de dynamiser l’économie estivale d’une station entière.

L’offre française existante et les bonnes pratiques actuelles 

Pour se faire une idée du panorama français du VTT de montagne, voici plusieurs sites qui proposent des guides répertoriant les stations qui possèdent une offre en la matière :

Avec une offre mise en place il y a plus de 10 ans et l’organisation d’évènement spéciaux, les 2 Alpes jouissent d’une excellente image en termes de VTT. Les stations de Tignes et Val d’Isère, elles, ouvrent gratuitement leurs remontées aux VTTistes pendant toute la saison d’été. Mais quant à savoir quelle est la station préférée des riders… le débat a été lancé en 2006 sur skipass.com et on imagine qu’il continuera à faire rage dans les années à venir, si les stations saisissent à bras le corps cette belle opportunité touristique !