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Résumé de la Convention annuelle de la National Ski Area Association du 06 au 09 mai 2012 à San Antonio, Texas (1ère partie)

Du 06 au 09 mai 2012 a lieu la Convention de la National Ski Area Association à San Antonio, au Texas (USA). Ce rendez-vous  annuel, est l’occasion de mélanger business, conférences et rencontres avec les dirigeants des stations de montagne américaines et des équipementiers du monde entier. Nous avons la chance d’y être invité pour y faire une conférence sur l’intérêt de la géolocalisation sociale dans le secteur du tourisme. Résumé des deux premières journées à l’image de ce continent… hors norme !


Journée 0 : Cadillac, Stetsons et un Mall aussi grand qu’une station de ski
L’accueil à l’aéroport par un chauffeur en Cadillac « Escalade » a donné immédiatement le ton de cet événement : du très haut niveau ! Comme nous avons eu la chance d’arriver une journée à l’avance, nous en avons profité pour visiter un peu. San Antonio est une ville colorée typique des Etats du Sud des USA : des avenues parfaitement droites quadrillent l’espace, un mélange de styles architecturaux parfois incongru (colonial, pueblo et des buildings modernes), des restaurants tous les 50 mètres (les américains mangent jour et nuit…) et d’immenses Malls – la surface commerciale de Rivermall, la principale gallerie commerçante de S.A, doit être aussi vaste que le village de Val Thorens ! La ballade sur le Riverwalk, au bord de la rivière qui traverse la ville, est non seulement très agréable (à condition de la faire à la fraîche le matin… quand il ne fait que 32°C !), mais regorge aussi de bonnes idées pour toute personne qui travaille sur la scénarisation d’espaces naturels et/ou urbanisés, ainsi que sur les problématiques de signalétiques et d’orientation des visiteurs. Petit détail en passant, si vous voulez suivre la tendance vestimentaire : quelque soit la température extérieure, la tenue de rigueur est jeans, bottes de cuir et chapeau Stetson.

Journée 1 : Golf et speed conférences
La 1ère journée s’ouvre traditionnellement sur un tournoi de golf, suivies de conférences d’une trentaine de minutes maximum. Trois ou quatre conférences ont lieu en même temps. Nous avons donc dû faire des choix :

1°) « La convergence marketing : E-mailing, média sociaux et service client ne font qu’un ! » par Corey Ryan de Ryan Solutions :
Nous y apprenons – à notre grande surprise – que les lundis, vendredis, samedis et dimanches sont les meilleures journées pour envoyer des e-mails si l’on souhaite maximiser son taux d’ouverture. Les autres jours, il y a trop de « bruit » et les internautes sont moins disposés à lire des e-mails qui touchent à leurs activités personnelles. Pour ce qui est des campagnes d’e-mailing commerciaux spécifiques aux stations de montagne, celles lancées du 15 octobre jusqu’au 15 Janvier sont les plus performante. Une fois  la mi-janvier passée, les taux d’ouverture des e-mails chutent drastiquement. Pour la saison d’été, l’idéal est de faire partir sa campagne du 25 juin au 5 Juillet. Cela nous semble bien tardif pour déclencher un achat de vacances en montagne, même en période estivale. Toutefois, il est important de préciser que ces résultats ne sont valables que pour le marché américain. Or, culturellement les habitudes d’achats et de consommation des vacances sont très différentes de celles des européens et des français en particulier.

Corey Ryan fait apparaître très justement que 69% des destinataires des e-mails utilisent leurs téléphones mobiles pour lire leurs messages avant de les lire à nouveau sur leurs ordinateurs. Or 70 % d’entre eux les détruisent immédiatement si ça ne les intéresse pas ou si le message ne s’affiche pas correctement sur leurs téléphones. Pour maximiser son taux d’ouverture, il est donc essentiel que les e-mails s’affichent correctement. Par ailleurs, Corey Ryan ajoute que plus les images sont qualitatives et larges, plus le taux d’ouverture sera important (en moyenne 21% de plus pour une station comme Squaw Valley, CA) ! Dans la foulée, il indique que la personnalisation de ces visuels en fonction du type de vacances que les gens ont acheté améliore très nettement le taux de lecture effective des e-mails. Ainsi, utiliser des photos avec des enfants pour les personnes qui viennent avec leur famille, ou avec des groupes d’amis ou des couples pour ceux qui viennent en tribu ou en couple permet aux destinataires de se sentir plus concerné par le contenu du message véhiculé dans l’e-mail, même si le contenu textuel de celui est strictement identique. Du bon sens, nous direz-vous !

Corey Ryan suggère ensuite plusieurs idées d’e-mailing :

  • Envoyer un mail pour l’anniversaire de la dernière réservation faite par le client avec le message disant : «  le même jour l’année dernière, vous aviez réservé votre séjour chez nous. Nous espérons que nous pourrons vous revoir cette année encore ! » ;
  • Il précise aussi que les e-mails comportant des informations sur la météo sont ceux qui ont le plus gros taux d’ouverture.
  • Envoyer un mail de préparation du séjour 5 à 7 jours avant l’arrivée des clients pour leur donner des infos pratiques sur leur arrivée.
  • Envoyer un e-mail de bienvenue le jour d’arrivée semble très apprécié, car les clients sont de plus en plus nombreux à venir avec leur ordinateur ou, au moins, avec leur Smartphone. Dans cet e-mail, il convient de souhaiter la bienvenue aux visiteurs et de leur donner des infos pratiques du type : météo de la semaine, animations quotidiennes, activités disponibles, événements, promotions dans les restaurants/loueurs de matériel de ski, etc.
  • Envoyer un e-mail le lendemain du départ des vacanciers pour les remercier de leur séjour, recueillir leur avis et leur demander de poster un petit message sur les réseaux sociaux. Il convient aussi de leur glisser une proposition de séjour pour l’année prochaine avec un tarif spécial « clients fidèles » en intégrant les dates de vacances par zones pour l’année n+1.

Enfin, l’intervenant termine sa présentation en prenant l’exemple de Telluride (CO), où 52,3 % des clients déclarent être actifs sur les média sociaux – essentiellement sur Facebook (35%), mais très peu sur Twitter (1,4%) – alors que moins de 30% sont fans de la page de la station sur Facebook. Il précise, qu’en moyenne aux USA, seulement 22% des visiteurs suivent les flux d’informations sur les média sociaux de la destination dans laquelle ils passent leurs vacances.

2°) « Augmenter la profitabilité de chaque client » par Michael McDermott de Active Network :

L’intervenant était censé nous expliquer comment générer autant de revenus que possibles par visiteur en créant un maximum d’occasions de dépenses et comment avoir plus de « bons » clients et éliminer les « mauvais » en utilisant les données collectées dans ses fichiers clients. Malheureusement, sa présentation s’est révélée être une sorte de long monologue publicitaire sur les activités de sa société. No comment.

3°) « Innovation Showase » :

Nous avions déjà assisté à ce type de présentations lors de l’International Tourism Symposium 2011 à Zermatt. Le principe est simple, dynamique et particulièrement agréable pour découvrir très rapidement des entreprises innovantes : chaque entrepreneur a 3 à 5 minutes maximum pour présenter sa société et/ou son dernier produit. Parmi les 14 entreprises présentes, nous avons ainsi pu voir :

  • Siriusware qui intègre des lecteurs de cartes bancaires et de codes barres sur les téléphones mobiles ;
  • American Locker qui commercialise des casiers dans lesquels il est possible de recharger ses appareils électroniques (Tél, PC, iPad) pendant qu’on va skier ;
  • Leitwind qui fabrique des éoliennes pour les stations de ski ;
  • Elan qui est venu présenter son nouveau modèle « Amphibio »… très impressionnant !
  • Doppelmayr qui venu parler de leur système de protection pour les enfants sur les gardes-corps des télésièges. Il faut savoir que culturellement aux USA, personne ne baisse le garde corps… quand il y en a, car c’est loin d’être le cas partout ! Or, cet hiver, plusieurs enfants sont décédés en chutant de télésièges aux USA.
  • Liftopia qui propose depuis 5 ans du yield management appliqué à la vente de forfaits de remontées mécaniques. Ils essayent doucement de pénétrer le marché européen, mais rencontre beaucoup de résistance car, si ces pratiques sont courantes et très bien acceptées pour les compagnies aériennes, les sociétés de remontées mécaniques semblent ne pas percevoir tout l’intérêt de ce mode de gestion des flux.
  • Leitner-Poma / Sigma qui est en train de développer le « Las Vegas Linq Project », une roue de 167 m de hauteur avec des cabines pouvant accueillir 40 passagers, avec des dizaines d’écrans plasma à l’intérieur, une station iPod pour avoir sa propre musique… mais pas de toilette, or le tour durera 30 minutes !

Rendez-vous ici pour le résumé de la deuxième journée de cet événement !

Comment déplacer son coeur de métier et diversifier son activité ? L’exemple de Poma.

Dans le cadre du Club Euro Alpin, SWiTCH a eu le plaisir de visiter la société Poma et l’une de ses filiales, SIGMA, qui produit l’intégralité des véhicules Poma : du siège au funiculaire en passant par les cabines de téléphérique. Pour les non skieurs, c’est une entreprise française créée en 1936 sous le nom de Pomagalski. Cette même année, elle révolutionne la pratique du ski avec l’installation du premier téléski à l’Alpe d’Huez. Suite à ce premier succès, la construction de remontées mécaniques s’accélère et offre de nouvelles perspectives de développement aux stations de montagne. Avec la réalisation du téléphérique de l’Aiguille du midi en 1956, des premières télécabines automatiques dix ans plus tard, des premiers télésièges débrayables en 1982 ou du Vanoise Express en 2003, Poma semble toujours avoir un temps d’avance en terme de transports par câble. Avec plus de 830 employés dans le monde et un CA de 250 millions d’euros en 2010, le constructeur français se place comme l’un des géants de son secteur. Quelles ont été les clés de la réussite ?

Malgré le succès grandissant des produits liés à l’activité neige, l’équipementier a très rapidement fait le choix d’élargir son cœur d’activité. Contrairement à certains de ses concurrents sur le secteur neige, Montaz par exemple, l’entreprise iséroise n’a pas attendu la maturation et le déclin global du marché des remontées mécaniques en station de ski pour se diversifier. En 1950, l’activité neige représentait 100% du chiffre d’affaire, 33% en 1976 et moins de 1,5% aujourd’hui.

Poma a fait le choix de capitaliser sur sa principale force pour opérer ce changement : la technologie. En tant qu’entreprise en avance sur son époque, il était nécessaire de préserver cette base technique. Ainsi, la diversification devait passer par un changement de marché. Poma a donc fait le choix de se développer un secteur d’activité bien différent de son cœur d’activité historique : le secteur urbain.

Pour cela, il a fallu investir massivement afin d’évoluer techniquement. Un équipement de transport câblé classique en station fonctionne environ 1000h par an. En milieu urbain cette durée est multipliée par 7 et les contrats imposent une disponibilité de l’équipement à 99,8% du temps. Autant de contraintes qu’il a fallu surmonter, une fois de plus, grâce à la technologie.

L’une des dernières réalisations de Poma ? La télécabine de Medellin. Avec trois tronçons, quatre stations, un débit d’un millions de personnes par mois, elle permet de relier plusieurs lignes de métro et s’intègre complètement au réseau de transports urbains classiques. Avec des infrastructures moins lourdes, un faible impact écologique et un coût d’exploitation deux à trois fois moins élevé que celui du tramway, le transport par câble séduit de plus en plus de mégapoles : Le Caire, Rio de Janeiro, Taipei, etc.

 

A l’heure de la crise économique et du Grenelle de l’environnement, pourquoi ne voit-on pas fleurir des projets de transport câblé dans toutes les grandes villes françaises ?

D’après Pierre Jaussaud, Président de l’association « Le chainon manquant », il existe trois principaux freins au développement du transport par câble :

  • Un frein technique (et psychologique ?) : l’adaptation des transports câblés au milieu urbain nécessite une réelle évolution technique afin de garantir un niveau de fiabilité, de service et de sécurité irréprochable. C’est chose faite à 99% aujourd’hui, comme le montre les installations présentées précédemment.
  • Un frein financier : les bureaux d’étude en charge de la sélection des dossiers sont commissionnés à hauteur de 4% du montant total du budget choisi, ce qui peut constituer un critère de sélection entre deux dossiers… De plus, les transports par câble pâtissent d’une méconnaissance en termes de coûts, de fonctionnement ou d’impacts écologiques auprès des bureaux d’étude.
  • Un frein administratif. Les bureaux d’études doivent être agrées par le STRM-TG (Service Technique des Remontées Mécaniques et des Transports Guidés) pour suivre la construction de trams aériens. Or, le STRM-TG n’a actuellement agréé que 6 bureaux d’études ce qui freine considérablement le développement de ce moyen de transport.

Le désengorgement des centres ville et les préoccupations environnementales étant au cœur du débat politique des grandes agglomérations françaises, il semble indispensable d’analyser avec soin les opportunités que peut offrir le « tram aérien ». Poma est déjà prêt à saisir cette nouvelle opportunité…

Crédit photos : Jean-Baptiste Cotte, Around This World